domingo, 28 de febrero de 2016

Rouen sa maison natale.


En août 1584, le grand père de Pierre Corneille devient propriétaire de deux logis contigus situés dans une ruelle donnant sur la Place du Vieux Marché. Ces demeures sont alors désignées par les qualificatifs de "grande" et de "petite" maison, et c'est dans la dite "petite" au 17 rue de la Pie, aujourd'hui le 4, que voit le jour le 6 juin 1606, l'auteur du Cid, alors que son frère Thomas voit le jour dans la "grande", de même que leur soeur Marthe, mère d'un autre rouennais célèbre, Fontenelle. 

A la mort de leur père en 1639, Pierre et Thomas héritent de leurs maisons natales respectives. Voisins, et qui plus est, mariés à deux soeurs, les frères Corneille sont très proches tout au long de leur vie. C'est ensemble qu'ils quittent la rue Pie pour s'établir définitivement à Paris en 1662. Pierre Corneille ne se sépare pas pour autant de sa maison natale, il ne le fera que bien plus tard, un an avant sa mort. Pendant cinquante-six années consécutives, il vit dans cette maison de famille où il devient lui-même père de nombreux enfants. La vie rouennaise du célèbre dramaturge se partage alors entre sa profession d'avocat qu'il exerce au Parlement, et sa maison de la rue de la Pie, foyer domestique et lieu d'écriture où il compose une partie de son oeuvre. C'est à Rouen qu'il compose ses premières oeuvres, des comédies telles que "Melite" 1630, "La galerie du Palais" 1633, "l'illusion comique" 1636. Ville natale, puis lieu de vie de Corneille, Rouen reste cependant absente de ses écrits. La dramaturgie classique, réclame en effet des cités antiques, scènes mythiques où Horace, Cinna, Nicomède pour ne nommer qu'eux, sont fatalement confrontés au choix cornélien du devoir et du sentiment.

Depuis sa vente en 1683 et jusqu'au XX ème siècle, la maison connaît toutes sortes d'avatars. Elle manque d'être rasée au siècle des Lumières, afin de permettre la construction d'un nouvel Hôtel de Ville, fin dont elle réchappe grâce à l'abandon du projet jugé trop onéreux. Au début du XIXème siècle, un serrurier l'achète à la mairie et en fait son atelier. L'artisan entreprend des restaurations importantes mais avant que le plâtre ne recouvre la façade typiquement normande, son fils, par un heureux hasard, élève à l'Ecole des Beaux Arts de Rouen, en fixe par le dessin, l'aspect extérieur. Initiative judicieuse, car des travaux d'urbanisme bouleversent la physionomie de la maison sous le Second Empire et la façade est démolie puis reconstruite deux mètres en arrière afin d'élargir la rue.

Par la suite, le lieu demeure longtemps un débit de boisson. L'année 1906 et ses festivités commémoratives en l'honneur du tricentenaire de la naissance du poète, sont l'occasion d'une prise de conscience de la valeur patrimoniale du lieu.  Un comité se forme dans le but de réunir des fonds, son activité aboutit en 1912, date à laquelle la maison est remise à la Ville de manière à être restaurée 'entres autres en lui restituant sa façade) et d'y installer un musée cornélien. Enrichi en 1917 par le don de la précieuse collection  d'Edouard Pelay, le musée cornélien est inauguré en 1921. Ce rouennais bibliophile, féru de Corneille, a réuni pendant près de soixante ans, des éditions originales, des traductions, des livres rares mais également des gravures, estampes et autres documents se rapportant tous au célèbre auteur et à sa famille.  Le Musée dispose également d'un petit secrétaire authentique, ce cabinet cache dans ses tiroirs l'écriture de Corneille, petits mots d'encre qui dévoilent l'identité du propriétaire par l'allusion au "Cid". Derrière un mécanisme ingénieux, des boîtes révèlent aussi le caractère de l'homme, qui s'avère prévoyant si l'on en croit la boîte nommée " trésor de réserve" et consciencieux autant qu'organisé dans le travail, comme le montre les suivantes "à retoucher" et "mes notes".

En somme, il reste aujourd'hui de la "petite" maison de Corneille, l'atmosphère d'une demeure de l'époque, meublée dans le style Louis XIII, évoquant bien l'esprit de l'ancien maître des lieux, l'itinéraire racontant Corneille à travers les siècles, permet au visiteur qui parcourt ces pièces, d'imaginer aisément le quotidien de ce virtuose du vers, figure majeure du classissisme français.




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